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Un bateau rempli de dŽchets erre au milieu de lĠocŽan. Aucun port ne veut lĠaccepter car il contient des matires dangereuses. LĠŽquipage se meurt peu ˆ peu ; le drame nĠest pas loin.

 

QuĠest-ce qui vous a poussŽ ˆ Žcrire ce roman ?

         Ce qui mĠa attirŽ, cĠest le fait que nos pays surdŽveloppŽs, avec une technologie trs avancŽe dans beaucoup de domaines, comptent sur les pays sous-dŽveloppŽs pour se dŽbarrasser de cette montagne dĠordures sous laquelle nous risquons dĠtre ŽtouffŽs.

JĠai publiŽ mon premier roman, Ç Pirates du Rh™ne È, dans les annŽes 50. Quelques annŽes plus tard, quelqu'un qui faisait une Žtude sur moi a dit : Ç Clavel faisait de lĠŽcologie avant que le mot ne soit dans les journaux È, puisque dŽjˆ ce premier roman, cĠŽtait la construction de lĠŽpouvantable canal du Rh™ne qui soulevait les mmes problmes, mais dĠune autre faon

 

Vous semblez extrmement documentŽ.

         JĠai beaucoup la presse, jĠai rencontrŽ des gens qui connaissent la question pour avoir des renseignements trs prŽcis, jĠai vu des amis mŽdecins pour tre sžr de ne pas commettre dĠerreur sur les effets des produits que transporte ce navire, et puis je suis allŽ naviguer sur des cargos pour voir comment se passe la vie ˆ bord.

JĠai cependant Žcrit une fiction. Elle mĠapporte une grande libertŽ et je ne voudrais pas quĠon en dŽduise que cĠest essentiellement un roman de combat. Je lĠai fait avant tout pour Žcrire une histoire. Pour me raconter une histoire.

 

Le Ç Gabbiano È, ce Ç bateau rouillŽ qui porte le nom dĠun bel oiseau des mers, effraie comme un monstre contre lequel nul chevalier ne veut prendre les armes È. Sauf Bernard Clavel qui trouve des accents lyriques pour dŽcrier la malŽdiction du nouveau Hollandais volant. Il nous le montre accompagnŽ dans son errance par des Ç goŽlands vtus de deuil dont la Ç aouk È rauque et sinistre semble rappeler le malheur È. Malheur inŽvitable si lĠon rŽprimait la criminelle activitŽ des convoyeurs de peste.

 

                  Roman de la colre, certes. Mais le romancier conna”t ses privilges et son pouvoir : il laisse la parole ˆ son personnage principal, la mer. CĠest elle qui gronde, qui se rŽvolte. Livre ™ combien dĠactualitŽ ! La fiction brasse ici une rŽalitŽ qui nous Žpouvante, qui nous poursuit, bien que nous nĠen apercevions pas toujours lĠampleur dans les mŽdias. La littŽrature ne mŽrite-t-elle pas, justement, son nom lorsque lĠimaginaire chasse lĠanecdote ? la malŽdiction nous Žveille et nous dŽrange dans nos torpeurs lorsquĠelle dŽbouche sur un plan mythologique. Et, puisque nous sommes ˆ bord, embarquŽs pour lĠenfer, la question est en effet de savoir qui nous mne en bateau.

Le roman et lĠŽcologie nĠont jusquĠˆ prŽsent pas fait dĠenfants trs remarquables. Sans doute faut-il, dans ce domaine, dŽpasser lĠŽcologie du premier degrŽ, transcender les bons sentiments, bousculer les thses, et nous rappeler aux valeurs essentielles. Bernard Clavel provoque la rage de lĠocŽan poubelle, mais au creux de la vague, nous trouvons de rudes hommes qui pleurent. Non pas seulement parce que les vapeurs toxiques des fžts maudits attaquent les yeux, mis parce que les larmes viennent toujours du plus profond de lĠhomme.

 

Extraits dĠarticles de presse, fŽvrier 1993