Bernard Clavel publie en 1982 un bref récit dont le héros est proche de lui. Un homme traîne dans le Lyon populaire des années 30 en quête de compagnons prêts à partir avec lui au nouveau monde. Voyageur intrépide ou mythomane, il parvient à éblouir ses auditeurs au point que les rêves de voyage transforment leur vie et, d’abord, celle de la jolie Nelly qui s’apprête à le suivre et à partager sa vie.

Bernard Clavel :

« J’aurais sans doute dû attendre, réécrire. J’avais le projet d’une nouvelle version où Nelly, vieillie, racontait son aventure. Mais quoi ! les éditeurs me réclament les manuscrits sitôt écrits, alors que j’ai pour principe de les laisser dormir pendant un an. »

Josette Pratte :

« C’est tout de même merveilleux, deux êtres qui vivent ensemble et pour qui l’essentiel est l’imaginaire. »

On retrouve ici un sens instinctif de la mise en scène. Le dialogue hésite entre lyrisme et tranche de vie. Les caractères sont grossiers jusqu’à devenir émouvants dans leur exemplaire et poétique simplicité ; c’est l’avantage du roman populaire. Au comptoir, les hommes sont balourds, rêveurs, buveurs, ils s’apostrophent avec une rudesse théâtrale.

Toute une humanité dont le modèle semble perdu depuis des lustres nous est rendue dans ce livre, pour peu que l’on retrouve ses quinze ans. L’auteur lui-même, malgré ses épaules solides, son crâne poli par deux décennies de capuches fourrées, son expérience du Grand Nord canadien ressemble aussi à ses héros.

Extrait d’articles de presse, mai 1982, février 1994